Le lin n’a pas disparu des garde-robes, mais sa nature végétale renouvelle le succès de ce tissu de premier plan. Lisse ou chiffonné, avec ses teintes claires et sa légèreté, il fait le bonheur des adeptes de naturalité.
Isolante et anallergique, la fibre naturelle de lin rencontre un vrai succès. La plante est cultivée dans la moitié nord-ouest de la France. Elle est écologique, et contrairement au coton nécessite peu d’eau pour sa culture, la remettant au goût du jour. La filière est en cours de régénération et de nombreux projets enthousiasmants naissent grâce à un marché très porteur.
Le lin français poursuit ses investissements
Cette entreprise familiale française créée en 1957 est une spécialiste du teillage, une opération classique de l’industrie textile qui consiste à séparer les fibres de chanvre ou de lin de l’écorce et de la partie ligneuse de la plante. La société en pleine croissance vient de changer à la fois de nom et de taille, avec une nouvelle usine. Installé à Quaëdypre, Le lin français-Jean Decock ouvre un nouveau site dans l’Aisne sous l’impulsion de la nouvelle génération, la troisième : Quentin Decock, et son cousin Edouard. Deux nouvelles lignes de production et 24 emplois ont vu le jour en mai dernier pour faire face à la hausse de la demande.
Un investissement de douze millions d’euros a été réalisé qui prouve la bonne santé de l’entreprise et du marché. Grâce à ce grand pas en avant, elle pourra transformer sur ses deux sites 40 000 tonnes de lin. Le lin Jean Decock est cultivé dans les Hauts-de-France et la commercialisation après teillage est vendue aux filatures du monde entier, en Europe, mais surtout en Chine et en Inde. Mais oui ! Le lin français s’exporte, très bien même. Une culture qui fait l’unanimité car elle demande peu d’intrants et favorise l’activité biologique des sols.
Marion Lemaire pour le renouveau de la filière
La créatrice de Splice, Marion Lemaire, veut porter haut les couleurs de la France. Si le pays est le premier producteur de lin textile au monde, il n’existe plus de filature dédiée sur le territoire, autant dire que l’idée de créer une marque made in France était loin d’être évidente. Rien ne prédisposait la jeune femme à s’aventurer sur ce territoire. Après des études de droit et d’informatique et son mariage, elle part en direction des Etats-Unis en 1998, une parenthèse de deux ans qui renforce ses capacités d’adaptation. Comme pour de nombreuses femmes, la vie continue entre travail et la naissance de trois enfants.
La création de cette famille fait naître d’autres envies, pour plus de naturalité. Il y a une dizaine d’années en arrière, il est bien compliqué de trouver pour tous les membres de la famille des vêtements 100% français. La voici qui commence à créer sa marque de vêtements pour enfants, « Naturellement Petits », dont le lancement effectif se fait il y a cinq ans. Ce n’est pas facile pour notre nouvelle entrepreneure, mais c’est une occasion pour rencontrer quelques autres militants du made in France, tels que Thomas Huriez (« 1083 »). Un projet plus large prend forme, basé sur le lin.
Le concept de base est planté : « On cultive magnifiquement bien le lin en France mais on ne file plus. C’est inacceptable. ».
Et pourtant vrai, Safilin, la dernière filature française, a fermé il y a des années pour s’installer en Pologne. C’est avec cette entreprise et le soutien de Thomas Huriez que le projet prend forme : Safilin va revenir en France pour proposer des vêtements 100% français. Une première étape enthousiasmante qui doit se concrétiser par la conquête de nouveaux clients afin que l’aventure soit pérenne. Marion Lemaire espère que certains clients du luxe qui travaillent avec l’étranger réfléchiront favorablement à cette nouvelle option qui leur est ouverte, ou pourquoi pas certains grands distributeurs, particulièrement intéressants en termes de volumes.
Depuis 2020, l’entreprise de Marion Lemaire, Splice, a intégré l’accélérateur des Forces Françaises de l’Industrie, qui assiste les PME dans leur processus de ré-industrialisation de la France. Un vrai projet à suivre de près.
Alsace, terre du renouveau textile ?
Si le projet de renouveau textile se concrétise, ce sera en grande partie grâce à Pierre Schmitt, ancien cadre de DMC, qui a repris ces dernières années des entreprises en grand danger : Son groupe Velcorex, dernière entreprise de velours en France, détient aussi Emmanuel Lang, spécialiste du tissage de matières naturelles et Tissage des Chaumes, spécialisé dans le luxe. Avec Philea et ses soieries, ce nouveau groupe représente 30 millions de chiffres d’affaires pour 150 salariés. Une véritable aventure, car le textile n’est pas véritablement le secteur bien-aimé des banquiers.
Il a donc fallu passer par les plateformes de financement participatif pour financer les derniers projets. Il faut de l’obstination et un peu de colère pour s’atteler à une tâche aussi complexe que celle de la préservation de savoir-faire textiles autrement voués à la disparition. La nouvelle filature de lin vient donc de se lancer en production à Hirsinque. Jeans et chemises sont les premiers vêtements à être sortis de l’usine. Il faut dire que cet entrepreneur expérimenté est un passionné et un têtu.
« Indigné » il l’est, et c’est en partie ce qui lui a permis de rassembler autour de lui des anciens techniciens qui disposent du savoir-faire pour remonter les machines. Il avoue que la crise sanitaire a rendu service à ce type de projets, dans la droite ligne du mouvement de renaissance de l’industrie française. Le lin provient de la coopérative Terre de Lin qui rassemble la production de quelques 600 agriculteurs.
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