Distancés depuis les années 1970 par les vélos fabriqués en Chine, les deux-roues français remontent la pente. En version électrique… et premium !

Jamais en France le marché du vélo ne se sera aussi bien porté que ces deux dernières années. Et tout particulièrement pour les vélos à assistance électrique (VAE). Selon l’Observatoire du cycle, leurs ventes auraient en effet progressé de 29% en 2020, représentant désormais 56% du chiffre d’affaires total du secteur (+ 58% par rapport à 2019). Leur prix d’achat moyen aurait suivi le mouvement : durant la même période, il serait passé de 1.595 à 2.079 euros. Et 2021 semble confirmer la tendance, voire l’accentuer.

La conscience écologique ayant pris le pas, l’envie (et le besoin) d’une mobilité plus verte a incontestablement gagné du terrain. Et parce que la crise sanitaire aura fait bouger nos lignes, la nécessité de consommer local s’est renforcée. En matière de vélos comme ailleurs, le made in France est devenu un argument marketing aussi imparable qu’irrésistiblement attirant. Peu importe si leurs prix peuvent parfois atteindre des sommets…

Parmi les enseignes apparues ces dernières années, la start-up rouennaise Le Vélo Mad fait concevoir et assembler ses trois modèles (dont Le Sport + Edition Tour de France, qui s’affiche à 2.490 euros) par la Manufacture française du cycle (MFC), premier fabricant de vélos en France. Depuis sa création il y a 90 ans, la MFC assemble dans son usine de Machecoul, en Loire-Atlantique, quelque 400.000 deux-roues chaque année, dont plus de 100. 000 VAE. Et si elle travaille pour de nombreuses marques, elle a aussi les siennes, dont certains ­modèles électriques dépassent 3.500 euros (jusqu’à 6.499 euros pour le VTT Kern SL Finest).

Tout près de là, sa toute jeune voisine – la nantaise Reine Bike – a lancé fin septembre la production de ses 800 premiers vélos dans ses ateliers de La Roche-sur-Yon. Inspiré des fameux beach bikes ­californiens des années 1960-1970, le Reine Bike connecté frôle les 3.500 euros. «Créer une marque française a été ma motivation ­première, assure son fondateur Stéphane Grégoire. En 2018, au moment de démarrer ce projet, les enseignes étrangères trustaient le marché du haut de gamme. L’idée était donc d’en créer une pour challenger les meilleures. Certes, notre moteur et certains composants viennent de Chine, mais, pour des questions de coûts, de compétences et d’outils industriels, fabriquer un premier vélo 100% français n’est pas possible sans atteindre un prix de vente de 8.000 à 10.000 euros. Nous voulions du haut de gamme, mais accessible !»

De 8.000 à 10.000 euros, c’est pourtant la fourchette de prix proposée par Coleen, qui conçoit, fabrique et assemble les siens dans son atelier de Biarritz. Rien ici ne vient d’Asie et, effectivement, ça se paie : les prix démarrent à 8.685 euros, auxquels il faut ajouter les options souhaitées. «Nos vélos sont prévus pour supporter des contraintes élevées en toute situation et sur du long terme, afin de répondre à un vrai besoin de ­mobilité, notamment avec nos speed bikes», précise le cofondateur, Thibault Halm.

Son identité 100% tricolore et des composants de haute qualité, le cofondateur des Cycles Cavale, Martin Bouche, y tenait lui aussi : «Nous avons lancé Cavale en novembre 2019 lors du salon Made in France. Mon idée était de concevoir des vélos très simples, fiables, et surtout 100% français. Historiquement, nous sommes un grand pays de fabrication de vélos. Hélas, depuis les années 1970-1980, ce savoir-faire et cette réputation avaient quasi disparu au profit de l’Asie du Sud-Est. Alors, humblement, nous avons voulu retrouver cela !»

Le prochain objectif de la start-up parisienne ? De nouveaux modèles, pour la route cette fois, mais aussi la conquête d’un public hors de nos frontières. «Nous sommes convaincus que nos vélos ont un potentiel à l’export, que ce soit en Belgique, en Suisse ou en Allemagne. Nous avons d’ailleurs beaucoup de demandes.»

Au pays de Raymond Poulidor et de Julian Alaphilippe, la concurrence est pourtant rude, qui s’affiche résolument tricolore… et haut de gamme ! C’est simple, la liste ne cesse de s’allonger, imposant même un long tour de France. Ainsi, peut-on parler d’Iweech, qui fabrique son vélo à assistance intuitive (2.950 euros) chez lui, à Marseille. Ou encore de Voltaire, dont les deux-roues connectés (à partir de 2.390 euros) sont conçus à Paris, développés dans la Sarthe et assemblés dans l’Aube. Angell, dont le premier VAE a été imaginé par le designer Ora-ïto, produit ses cadres avec de l’aluminium du Sud-Ouest, et son fondateur Marc Simoncini (le créateur de Meetic) vient de signer un accord avec la marque d’électroménager Seb pour réaliser les assemblages dans son usine d’Is-sur-Tille, en Côte-d’Or. Prix de vente : 2.860 euros.

Reste Moustache, qui propose pas moins de 65 modèles pour tous les usages, commercialisés entre 2 .700 et 7.200 euros. Preuve que le pavillon français a le vent en poupe, en 2020, Moustache a assemblé 50.000 cycles dans son usine des Vosges, et a dû depuis agrandir son unité de production de 50%.

Enfin, il y a les revenants. Ou plutôt LE revenant. Pendant plus de ­quarante ans, de l’après-guerre jusqu’en 1988, le Solex aura marqué des générations entières au point de faire partie intégrante du patrimoine français. Mais le temps et ses effets de mode ont passé, et l’ère du Solex semblait enfuie. Pas du tout ! Désormais sous contrôle du groupe normand Easybike, il revit sous forme de différentes gammes de VAE. Parmi les modèles (tous fabriqués à Saint-Lô, dans la Manche), le récent Intemporel Infinity ravira les plus nostalgiques puisque conçu à l’identique (ou quasi). Contre 2.599 euros, c’est donc un vrai retour vers autrefois que l’on peut s’offrir. Et ça, c’est cadeau !

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