À l’heure où la compétition pour les modèles électriques d’entrée de gamme à 20 000 euros se dessine, une étude réalisée par la Fondation pour la nature et l’homme (FNH) et l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri) indique que la production de voitures citadines électriques en France pourrait être compétitive d’ici à 2030. Cependant, la Chine conserverait son avantage concurrentiel.
L’organisation environnementale rappelle que l’industrie automobile française a subi plus de deux décennies de délocalisations. Depuis les années 2000, la production nationale a été réduite de moitié. Les véhicules de petite taille (segments A et B) ont été particulièrement touchés, comme en témoignent la production de la Renault Twingo en Slovénie, de la Renault Clio en Turquie, de la Peugeot e-208 en Espagne et de la nouvelle ë-C3 en Slovaquie.
« En prenant l’exemple d’une citadine 100 % électrique, produite en France, nous avons comparé son prix de revient théorique sur notre territoire (dans une région telle que les Hauts-de-France) avec une fabrication qui serait délocalisée en Espagne, en Slovaquie ou en Chine », expliquent les auteurs de l’étude. « La conclusion est claire. À échéance 2030, la production française peut être compétitive face à tous ces pays ». Avec, à la clef, la relocalisation de la production de 700 000 citadines, et la création de 25 800 emplois sur le territoire.
L’électrique, un avantage pour une relocalisation
En détail, le différentiel de compétitivité serait de seulement 2,5 % avec l’Espagne, soit 400 euros de coût de revient par véhicule, et de 2 % avec la Slovaquie, soit 260 euros. « Il s’agit là d’écarts faibles qui amènent à questionner les critères de localisation des modèles ou des usines de la chaîne d’approvisionnement ». Ce constat est d’autant plus pertinent compte tenu du développement de la chaîne de valeur des modèles BEV, qui nécessitent une approche plus intégrée, moins de main-d’œuvre, et une proximité entre les gigafactories et les usines d’assemblage.
Toutefois, cette orientation nécessitera d’ajuster la stratégie de la France en matière de batteries de traction. Il est important de rappeler que la demande des constructeurs se dirige actuellement vers la chimie LFP (lithium, fer, phosphate), alors que les start-up françaises tendent à se positionner sur la technologie NMC (nickel manganèse cobalt).
Une matrice précise du prix de revient
Pour réaliser cette étude, l’organisation environnementale a défini une matrice très précise du prix de revient d’un véhicule du segment B assemblé en France, en décomposant les coûts poste par poste (batterie, moteur électrique, caisse, ouvrants, châssis, sièges…) et en prenant en compte toutes les dépenses d’investissement et d’exploitation, ainsi que les coûts de main-d’œuvre, les marges et les impôts, expliquent les auteurs de l’étude. Cette analyse couvre l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement, depuis l’extraction des matières premières jusqu’à l’assemblage du véhicule.
La matrice du prix de revient ainsi obtenue a été appliquée aux trois pays étudiés en faisant varier, à horizon 2028-2030, les paramètres de coûts à savoir : le prix de l’énergie, le coût du travail, le montant des subventions d’État et les taux des impôts de production. Les coûts de logistiques et de droits de douane ont également été intégrés.
L’avantage de la Chine sur la balance
Malgré le repositionnement de la France, la Chine conserverait un avantage compétitif de 6 %, soit une différence de coût de revient d’environ 1 000 euros par véhicule. Rappelons qu’aujourd’hui, parmi les citadines de marques françaises, seule la Dacia Spring est fabriquée en Chine et importée en France. En attendant la Leapmotor 03 dont l’importation et la distribution en Europe sont confiées désormais à Stellantis.
Seule la majoration des droits de douane envisagée par l’Europe sur les véhicules électriques importés depuis la Chine, pourrait changer la donne. La valorisation de l’empreinte carbone des véhicules sur l’exemple de l’éco-score appliqué au bonus écologique, permettrait aussi de disqualifier les véhicules produits sur le sol chinois qui ne pourraient pas en bénéficier. Des tentations dénoncées par plusieurs constructeurs européens, mais soutenues par l’Italie sur le modèle des États-Unis.